À Kigali, au Rwanda, le cyclisme britannique a vécu un moment historique : Harry Hudson est devenu le tout premier champion du monde junior sur route de l’histoire du pays. À seulement 18 ans, le coureur du Harrogate Nova Race a réalisé un incroyable numéro solitaire, tenant tête au peloton dans les difficiles ascensions finales de la capitale rwandaise. Derrière lui, le Français Johan Blanc et le Polonais Jan Michal Jackowiak complètent le podium, mais cette journée restera avant tout celle d’un coureur qui a osé et qui a tenu pour offrir un moment d’histoire à son pays.

Ce sacre, unique dans les annales, symbolise à la fois l’émergence d’une nouvelle génération britannique et la force de caractère d’Hudson. Là où tant de ses compatriotes avaient échoué par le passé – de Geraint Thomas à Tom Pidcock, en passant par Sebastian Grindley, vice-champion l’an passé à Zurich –, le jeune coureur a frappé un grand coup. Son exploit rappelle celui des grands noms qui se sont révélés en juniors avant de dominer le cyclisme mondial, de Remco Evenepoel à Mathieu van der Poel. Mais ce vendredi à Kigali, c’est bien le maillot arc-en-ciel qui s’est posé sur les épaules d’un jeune homme conscient d’avoir écrit une page de l’histoire de son sport.
La manière dont Hudson a conquis ce titre a été aussi impressionnante inattendue. Alors que la course s’annonçait particulièrement usante – sept tours d’un circuit exigeant, 119 kilomètres pour 2 671 mètres de dénivelé cumulé et la terrible montée pavée de Kimihurura (1,3 km à 6,3 %) à gravir à chaque passage, à laquelle il faut ajouter les terribles conditions –, le Britannique a choisi d’attaquer à plus de 35 kilomètres de l’arrivée. Ce geste n’était pas prévu, comme il l’a confié plus tard : « J’ai juste vu une opportunité, les autres semblaient s’observer après une montée difficile. Je pensais que d’autres coureurs allaient me suivre, mais je me suis retrouvé seul. » Ce qui devait être une simple tentative est devenu une chevauchée héroïque. Le scénario a fait basculer la course : les favoris, surpris par l’audace de ce jeune coureur, ont hésité, et cette hésitation fut fatale. Hudson a vu son avance fluctuer, jamais supérieure à trente secondes, mais il a tenu bon, repoussant le retour du Français Johan Blanc et du Polonais Jan Michal Jackowiak. Au pied de la dernière ascension pavée, son écart n’était alors que d’une quinzaine de secondes. Le Britannique a avoué avoir cru tout perdre à cet instant à cause d’un logique manque d’énergie : « J’étais mort, je craquais. Je pensais que j’allais me faire reprendre dans le dernier tour. » Pourtant, dans l’ultime portion de pavés, il a compris que Blanc lâchait quelques mètres. Un coup d’œil par-dessus son épaule lui a confirmé que son rêve devenait réalité. Dans le replat qui menait à l’arrivée, Hudson qui avait compris que la victoire était acquise a pu savourer, franchissant la ligne avec seize secondes d’avance et une joie incrédule sur le visage.
Cette victoire dépasse le simple cadre sportif. Elle marque une première historique pour le Royaume-Uni, pays qui, malgré ses immenses succès chez les élites et les féminines – Nicole Cooke, Lucy van der Haar, Cat Ferguson ou encore très récemment Zoë Backstedt – n’avait jamais couronné un junior masculin sur route. « C’est fou, je n’arrive pas à réaliser. Gagner un titre mondial, je n’y croyais pas », lâchait-il à l’arrivée, encore sous le choc, avant d’être félicité par Mark Cavendish lui-même, compatriote et ancien champion du monde élite. Ce moment symbolise un passage de témoin : la reconnaissance d’un champion établi envers une étoile montante. Hudson n’en est pas à son premier coup d’éclat. Cette saison déjà, il avait triomphé sur la version junior de Liège-Bastogne-Liège, sur la Classic Région Sud U19 et au Tour de Cantabrie. Champion national juniors de course de côte, il a confirmé sa polyvalence sur les terrains escarpés et les conditions difficiles du Rwanda. Surtout, son avenir semble déjà tracé : à l’horizon 2026, il rejoindra l’équipe de développement Lidl-Trek Future Racing, suivant le chemin emprunté par Sebastian Grindley avant lui. Avec des compatriotes également bien placés à Kigali – Max Hinds et Matthew Peace dans le top 5 –, c’est tout le cyclisme britannique qui sort grandi de cette journée grâce à des résultats jamais vus auparavant.
L’avenir d’Hudson s’annonce donc prometteur. En décrochant ce premier maillot arc-en-ciel, il rejoint une liste prestigieuse où figurent des coureurs devenus soit champions du monde élites par la suite, soit vainqueurs d’étapes sur les grands tours ou des plus grandes classiques. Le parallèle est inévitable : et si Kigali 2025 marquait le début d’une grande carrière internationale ? Le Britannique, lucide malgré l’euphorie, préfère rester modeste : « Je vais voir où cela me mène, mais monter sur un vélo me rend déjà heureux. ». Avec cette victoire, Harry Hudson n’a pas seulement remporté une course : il a possiblement ouvert une voie nouvelle pour les juniors britanniques et démontré qu’oser, même face à l’incertitude, peut mener au sommet. Le Rwanda, lui s’en souviendra, tout comme l’histoire du cyclisme britannique, désormais enrichie d’un chapitre inédit.